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Plaisir, goût et convivialité

Les aliments et la cuisine comme lien

Publié le 30/11/2006

Rougui Dia, Préface de Dominique Loiseau
Le chef est une femme
Jean-Claude Gawsewitch éditeur, 217 pages

D’abord le récit d’un apprentissage, d’une différence assumée et surtout d’une immense fierté, celle d’être, de penser et de se comporter en Peul tout en se sentant vraiment française et en choisissant la gastronomie pour se réaliser. Rougui Dia fait l’éloge de la discrétion, du respect du travail bien fait et de la mesure, pas de l’effacement ou de la soumission. Elle y raconte sa rencontre avec ces produits nouveaux et prestigieux, caviar, saumon. Son audace, oser les mettre dans des écrins de saveurs épicées, discuter le classicisme avec des jus d’hibiscus, des bananes plantain ou une sauce anisée sur des crustacées. Elle n’hésite d’ailleurs pas à commenter les choix de son célèbre patron, Armen Petrossian, qui l’a placée à la tête de sa célèbre enseigne mais qui n’assume pas toujours sa façon de réviser les classiques ! Là encore, audace d’une jeune chef qui a bien l’intention non pas d’imposer aux « hommes de l’art » sa cuisine mais que cette dernière s’impose à eux simplement, sans bruit, par évidence.

La célèbre étiquette de Petrossian représente un bateau, voiles tendues, calme et solide dans la tempête, et cette image sied bien à Rougui Dia qui nous invite pour finir à réaliser quelques-unes de ses recettes. Si vous êtes lassés des indétrônables mets de Noël, pourquoi ne pas tenter cette année le fois gras de canard au jus d’hibiscus et figues, les asperges croustillantes au lard et aux morilles ? Et, plutôt que la bûche, surprenez vos convives avec un feuilleté d’ananas vanille, sorbet de mangue et de menthe poivrée.

Sur les Peuls, le lait et l’ élevage laitier en Afrique, vous pouvez lire dans notre site des textes de nos intervenants au Café Géo organisé en avril 2006 au Café le Flore à Paris.

Fatéma Hal, photographies d’Erick Bonnier

Ramadam, la cuisine du partage

Agnès Viénot éditions, 172 pages

Ramadam, ce mois sacré des musulmans tout entier d’ascèse et de privation… de l’extérieur ! La réalité est toute autre, au Maghreb et en France : Ramadam est le sacre de la commensalité, de la convivialité, du foisonnement d’odeurs et de saveurs avec en plus le mystère de l’attente. Pour manger il faut attendre que l’œil ne puisse plus distinguer du seul fait de la lumière du jour un fil blanc d’un fil noir, puis, à ce moment là, c’est la rupture du jeûne. Une rupture d’abord tout en retenue avec un verre de lait et des dattes, puis dans un tourbillon de mets, de couleurs et de parfums, les agapes commencent. Les recettes de Fatéma Hal et les photographies d’Erick Bonnier nous invitent à rompre le jeûne avec eux et une famille de part et d‘autre de la Méditerranée. Bien entendu, il y a les recettes, chorba, harira, tajines, pastilla au lait, seffa (couscous sucré à la cannelle) jusqu’aux très étonnants œufs farcis aux amandes ; mais il n’y a pas que des plats dans ce livre, il y a une façon de les partager, de les manger, de les offrir, de les échanger. Il y a tout le sens du don, il y a cette atmosphère si particulière de ce mois de « carême » qui transforme l’acte de cuisiner en geste d’amour, en histoire de famille, en fête entre voisins.

En refermant ce livre, nos doigts sentent la cannelle et on se surprendra à rêver d’amandes, de figues confites et de pain à la menthe sauvage.