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Animal, végétal, végétarisme

De beaux livres sur l’élevage en France et dans le monde

Publié le 19/12/2008

BERGERS DU MONDE
De Bernard FAYE aux Editions Quae, 2008, 234 pages, plus de 400 très belles photographies.

Bernard Faye est le grand spécialiste de l’élevage laitier dans le monde mais il est aussi ethnologue dans l’âme et a un vrai talent de conteur et de photographe. Vétérinaire et ingénieur agronome (Inra/Cirad), il a roulé sa bosse pendant plus de trente ans dans toutes les régions du monde et porté un regard attentif sur pratiquement tous les systèmes d’élevage, toutes les espèces laitières : vaches, brebis, chèvres, chamelles, juments … Et sur tant de bergers, des bergers enfants aux bergers de grand âge, bergers animés par l’amour de leur troupeau et un lien fort à l’animal.
Résultat d’une vie de rencontres, ce livre fait l’éloge des bergers du monde. Ce livre raconte des histoires, des trajectoires de bergers rencontrés au hasard des parcours dans la fournaise sahélienne, dans les vents de sable des steppes d’Asie centrale, dans la moiteur amazonienne, sur les pentes de la montagne cévenole, dans les alpages savoyards ou sur les piémonts abyssins. Qu’ils veillent sur des troupeaux de rennes dans le Grand Nord ou élèvent, au cœur de la forêt tropicale, des bovins résistant à la redoutable mouche tsé-tsé, bien des peuples consacrent leur vie aux animaux et à la terre.
Au-delà de la diversité des pratiques et des savoir-faire, s’imposent la permanence d’un certain nombre de gestes, la force des liens avec les troupeaux, la place que l’animal occupe dans les pensées du berger et le sens social qu’il donne à son existence au-delà des contingences économiques. Tous ces visages croisés dans le monde sont des facettes du kaléidoscope que chacun porte en soi.
Lire la 4e de couverture et le sommaire de l’ouvrage “Bergers du monde”
De Bernard Faye, vous pouvez lire dans notre site : « La vache et autres herbivores. Passion et raison africaine », qui fait partie de textes réunis pour un Café Géo « Le lait, les Peuls, l’Afrique », un partenariat Ocha/ Les Cafés Géo

GRANGES FROMAGERES D’AUVERGNE. La vie des moines fromagers dans les montagnes de haute-Auvergne du XIIè au XVIIIè siècle.
De Claude Chappe-Gauthier, Editions Cheminements, 2007, 206 pages, photographies et dessins


Saviez-vous que le Cantal fut, au départ, un fromage d’abbaye ?
Au Moyen Age, les moines sont les seuls à détenir le savoir fromager et les cisterciens, chaque fois qu’ils en ont la possibilité, ont porté au plus haut degré la technique et la qualité. C’est sans doute ce qui s’est passé pour le fromage de Cantal.
Des moines de l’abbaye cistercienne d’Aubazine en Limousin, établirent vers 1175, un vaste complexe agricole, la « grange de Graule », en pleine montagne, au nord-est du Puy Mary ainsi qu’une seconde « grange » à Brocq près de Menet. Les archives permettent de constater qu’au XVème siècle, la « fourme de Cantal » avait une excellente réputation qui disparut deux siècles plus tard. Les paysans tenteront, avec l’aide de vachers suisses et sous l’impulsion de l’Intendant d’Auvergne, la fabrication du gruyère. Ce sera un échec.
Du XIIème siècle à la Révolution, c’est à la fois la vie des convers, la fabrication du Cantal autrefois, l’évolution de la race de la vache de Salers, la construction en montagne et le fonctionnement des moulins d’altitude qui sont évoqués dans ce livre.
L’auteur est architecte et a travaillé avec des grands de l’architecture contemporaine tels que Charlotte Perriand et Jean Prouvé. Passionnée pour l’architecture rurale du Cantal et les anciennes techniques, cela fait plus de vingt ans qu’elle a orienté ses recherches vers les moines cisterciens, en particulier les convers qui travaillent dans ces véritables complexes agricoles que sont les « granges ».
Lire la 4e de couverture et le sommaire de l’ouvrage “Granges fromagères d’Auvergne”

ETRE PAYSAN EN VANOISE
De France Harvois pour les textes et de Pierre Witt pour les photographies, aux Editions Libris, ouvrage réalisé en partenariat avec le Parc naturel national de la Vanoise, 2007


« Si nous étions pessimistes, écrit Pierre Witt dans son avant-propos, nous aurions pu montrer les « derniers » paysans, témoins d’un monde finissant, pétri de nostalgie. Mais résolument optimistes, c’est d’un monde vivant, riche d’une histoire, tourné vers l’avenir, dynamique et novateur dont nous avons voulu être les témoins. Au temps du concept porteur du développement durable, ces paysans sont d’une incroyable modernité. » Les paysans sont la montagne vivante
Ce beau livre est le résultat d’un travail en profondeur entrepris depuis 2000 sur l’agriculture de la Vanoise à travers la vie quotidienne et l’expérience vécue de paysans. « Très vite, m’apparaissaient quelques évidences : le modèle productiviste ne peut s’appliquer à la montagne, soumise aux contraintes naturelles (la pente, une saison végétative réduite, etc.). Mais un produit de montagne est aussi porteur de valeur ajoutée, synonyme d’identité et de qualité, à condition de savoir le valoriser…. Qui connaît le goût incomparable d’un agneau d’alpage ? Enjeux économiques donc. Mais l’avenir économique est étroitement lié aux enjeux environnementaux, car l’entretien de l’espace, par ailleurs essentiel pour valoriser la production, doit lui-même être considéré comme un produit à part entière de l’agriculture. Le paysage, montagnard en particulier, a désormais rang de patrimoine culturel et constitue un élément essentiel de la qualité de vie. Notre société urbaine en est demandeuse, comme de cultures authentiques dont le paysan est l’acteur mais aussi le garant. » Les auteurs ont suivi pendant plusieurs mois la vie quotidienne de trois exploitations en Maurienne et de trois autres en Tarentaise. Ils permettent ainsi de prendre conscience que la Vanoise n’est pas seulement le « Royaume des bêtes sauvages » chanté par Samivel, mais que c’est aussi un territoire où paysans, bergers, éleveurs et fromagers vivent au rythme des saisons : l’alpage et le grand dehors l’été, la ferme et l’étable l’hiver.
A l’heure de la mondialisation et des normes européennes, alors que l’agriculture de montagne devient un enjeu de développement durable, les auteurs ont voulu témoigner du travail opiniâtre et patient de ces montagnards qui gardent la Vanoise vivante au cœur du parc national.
Le travail photographique remarquable de Pierre Witt a été distingué par le Prix International Leica. Les textes de France Harvois sont sensibles et tout en finesse.
Lire la 4e de couverture de l’ouvrage “Etre paysan en Vanoise”

BERGERS ET TRANSHUMANCE
De Anne Marie BRISEBARRE aux Editions de Borée, 2007, 224 pages


Ethnologue, directrice de recherche au CNRS, membre du Laboratoire d’Anthropologie sociale du Collège de France, Anne-Marie Brisebarre est spécialiste des rapports entre les sociétés humaines et leurs animaux domestiques. Elle est l’auteur de nombreux ouvrages, parmi lesquels Bergers des Cévennes chez Berger-Levrault et La Fête du Mouton aux Editions du CNRS.
Les bergers dont Anne-Marie Brisebarre nous raconte l’histoire dans ce beau livre des Editions de Borée sont à la fois d’hier et d’aujourd’hui, intemporels et modernes. Bergers (celui qui « éduque » les bêtes à laine), mais aussi gardiens des vaches (vachers), ou des bœufs (bouviers), des chèvres (chevriers) … Chaque année, depuis des millénaires, des éleveurs partent de nombreuses régions de France avec leurs troupeaux vers des pâturages plus gras. Fuyant la chaleur et la sécheresse de l’été, ou le froid et la neige de l’hiver, ils empruntent encore des chemins ancestraux tracés bien avant notre ère.
Malgré la modernisation de l’élevage, la transhumance repose encore sur l’expérience des anciens, elle est régie par des coutumes, des rituels et des décorations d’animaux dont cloches ou sonnailles rythment la marche. Partout, ces déplacements sont des moments de liesse que partagent aujourd’hui touristes et éleveurs dans les fêtes de villages et sur des drailles de la montagne.
Sur les pâturages d’altitude, où leurs ancêtres se battaient contre les fauves, les éleveurs d’aujourd’hui doivent face à de nouveaux ennemis, aux loups, lynx et ours réintroduits et protégés, mais aussi aux chiens errants. Près des parcs, on revoit ces énormes « patous », les chiens de garde qui avaient disparu des estives depuis des décennies.
Un magnifique livre organisé en trois parties :
– Bergers et troupeaux (ovins, bovins, caprins, mais aussi chevaux, porcs et abeilles),
– La transhumance des moutons, partie qui repose sur les nombreuses missions effectuées par l’auteur dans les Cévennes et dans les Alpes,
– Vaches, chevaux et abeilles, comprenant notamment un long chapitre consacré à la transhumance des vaches Aubrac et Salers et un autre sur les chevaux Merens dans les Pyrénées ariégeoises.
Il se termine avec un carnet d’adresses bien utile des musées, parcs naturels nationaux et régionaux , dates et lieux de fêtes de la transhumance, à travers la France, et même quelques contacts pour des randonnées en lien avec la transhumance.
Lire la 4e de couverture et le sommaire de l’ouvrage “Bergers et transhumance”

De Anne-Marie Brisebarre, vous pouvez lire dans notre site :
« Sacrifier pour l’Aïd el-Kébir en France »