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Comportements alimentaires

Be a vegetarian ! Discours en Inde sur les bienfaits du végétarisme pour un corps pur et sain

Publié le 02/08/2010

Pour les hindous orthodoxes qui sont végétariens, la vache n’est pas « bonne à manger » mais elle est fort « bonne à penser » pour reprendre les termes de Claude Lévi-Strauss, Hier, alors qu’il s’agissait de chasser les Britanniques et les musulmans du pays, la vache représentée en ‘vache-mère’ (vache Gomata) était érigée en symbole de la famille et de la nation hindoue. Aujourd’hui, l’ icône de la vache continue d’être brandie pour valoriser l’identité du bon hindou en opposition à celle des autres, musulmans, chrétiens, intouchables. Le lait, le lait fermenté et le beurre clarifié sont hautement valorisés comme nourritures dites pures (sattvika), qui ne doivent provoquer ni violence ni émotions et constituent, par excellence, la diète des brahmanes et des renonçants ; ces nourritures comprennent aussi certains fruits et légumes, les céréales, les légumineuses et les noix. Mais l’urine et la bouse font aussi partie des « produits sacrés » de la vache » et sont également mis à contribution pour voler au secours de la population malade de maux interprétés comme résultant de l’adoption de la culture occidentale au détriment des valeurs hindoues et pour satisfaire les nouvelles envies de consommation sans perdre son identité. Outre nombre de médicaments utilisés en médecine ayurvédique et des cosmétiques, un soft drink à base d’urine de vache garanti délicieux au goût et sans odeur – surnommée « Cow Ka Cola » – vient même d’être lancé pour concurrencer les colas classiques symboles de l’hégémonie américaine. Ce mouvement de moralisation de la société indienne s’appuie sur un discours hygiéniste pour valoriser la diète végétarienne, certains auteurs pro-nationalistes et pro-végétariens n’hésitant pas à s’appuyer sur des chiffres de consommation qui concernent les populations occidentales, notamment américaines, alors que la consommation moyenne de viande en par an et par personne en 1997 était de 4 kg en Inde contre 120 kg aux Etats-Unis !

Brigitte Sebastia est anthropologue et chercheur, dans le cadre du programme ‘Médecines et société en Asie du Sud », au sein du Département des Sciences sociales de l’Institut français de Pondichéry en Inde. Elle analyse pour l’Ocha cette idéologie dont les racines sont bien antérieures à son utilisation par Gandhi et sa radicalisation au cours des dernières décennies.

Lire le texte de Brigitte Sébastia

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  • sur alimentation, pollution et pureté dans l’Inde ancienne, le texte de Charles Malamoud :

https://www.lemangeur-ocha.com/fileadmin/contenusocha/5_C_Malmoud.pdf

  • sur pensée magique et notions de pur et d’impur liées à l’alimentation avec les exemples de l’hindouisme et du judaïsme, le texte de Paul Rozin :

https://www.lemangeur-ocha.com/fileadmin/contenusocha/02_magie_sympathique.pdf

  • sur les origines du végétarisme en Grande-Bretagne, le texte de Arouna Oueadrogo :

https://www.lemangeur-ocha.com/auteurs/detail/auteur-texte/0/les-origines-du-vegetarisme-en-grande-bretagne-a-la-fin-du-xviiie-siecle/disp/

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